La crise diplomatique entre la France et l’Algérie, qui perdure depuis juillet 2024, franchit un nouveau palier avec l’activation d’une arme inattendue : la politique des visas. Un communiqué de l’ambassade de France à Alger annonce une réduction drastique des effectifs consulaires et, en conséquence, de la capacité à traiter les demandes de visas. Cette mesure, présentée comme une conséquence de l’insuffisance de la coopération migratoire algérienne, est perçue comme un geste de pression sans précédent.
Une réduction d’un tiers des effectifs consulaires
Le communiqué de l’ambassade révèle que, dès le 1er septembre, les effectifs des consulats d’Alger, Oran et Annaba seront réduits d’un tiers. Cette décision fait suite au refus du ministère algérien des affaires étrangères de délivrer les visas d’accréditation nécessaires aux agents expatriés. L’impact est immédiat : la délivrance des visas sera sévèrement limitée, forçant le prestataire Capago à réduire le nombre de rendez-vous disponibles.
Le « chantage aux visas » : des mesures ciblées et un durcissement des conditions
Cette action diplomatique se traduit par l’application de mesures ciblées, notamment sur les visas de court séjour et de long séjour. La France se base sur l’article L. 321-1-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) pour refuser des visas de court séjour aux titulaires de passeports officiels en raison d’une insuffisance de coopération migratoire. De la même manière, l’article L. 312-3-1 du CESEDA est invoqué pour les visas de long séjour.
En plus de ces refus, l’application des conditions de délivrance des visas régis par le droit de l’Union européenne devient extrêmement stricte. Les justificatifs de séjour, de financement et de garantie de retour seront examinés de manière rigoureuse. Cette politique ciblée affecte des milliers de demandeurs, sachant que près de 110 000 visas de court séjour et 12 000 visas de long séjour avaient été délivrés au 31 juillet.
Des chiffres en baisse et un taux de refus élevé
Les données disponibles témoignent d’une tendance déjà baissière. Au premier semestre 2025, un peu plus de 100 000 visas ont été accordés aux Algériens, soit une diminution significative par rapport aux 22 000 visas mensuels délivrés 2024. Les délivrances mensuelles sont, ainsi, tombées à 17 000 en moyenne depuis janvier 2025. Le taux de refus, déjà élevé (31% globalement, 32% pour les visas de court séjour et 28% pour les visas de long séjour), pourrait encore s’accroître, se rapprochant des 50% enregistrés en 2022.
La diplomatie française mobilise l’Europe
La France a également activé l’article 22 du Code de l’UE des visas, demandant aux autres États membres de l’espace Schengen de la consulter avant de délivrer des visas, en particulier aux titulaires de passeports officiels. L’objectif est d’éviter le contournement de ses propres restrictions, montrant que la France cherche à isoler diplomatiquement l’Algérie sur cette question.
Cette escalade, en utilisant les visas comme monnaie d’échange, marque un point de non-retour dans les tensions entre les deux pays. Les conséquences pour les citoyens algériens, étudiants, chercheurs ou simples voyageurs, pourraient être lourdes.