Le procès en appel de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal s’est tenu, ce mardi 24 juin 2025, à la Cour d’Alger.
Dirigée par la magistrate Dahmani, célèbre pour avoir jugé l’ex-général Ali Ghediri, l’audience a été courte mais tendue. Boualem Sansal, vêtu d’un tee-shirt gris et les cheveux bien coupés, a été interrogé sur ses écrits, ses positions politiques et ses liens avec des diplomates et opposants. Dès le départ, la juge l’a questionné sur des déclarations en ligne concernant les frontières algériennes. Sansal a admis avoir critiqué l’héritage colonial, suggérant que la France avait encroché sur le territoire marocain et cédé des terres orientales à l’Algérie.
La magistrate a ensuite abordé ses échanges avec d’anciens ambassadeurs français notamment Xavier Driencourt, lui reprochant d’avoir ridiculisé les responsables algériens et les symboles étatiques. Sansal s’est défendu en qualifiant ces discussions de privées et humoristiques, tirées de conversations WhatsApp : « Doit-on tout prendre au sérieux ? » Sur ses supposés liens avec des figures de l’opposition, dont le MAK, il a répondu : « La France et l’Algérie sont mes pays, j’ai des relations variées et m’intéresse aux débats entre eux. » Il a aussi justifié son voyage en Israël en 2012 par un salon du livre, perturbé par un attentat.
La juge a fait noter l’absence de contenu culturel dans les saisies, mais Sansal a argué que son œuvre mêle politique et fiction. Le procureur l’a accusé d’ingratitude envers l’Algérie, où il a étudié, travaillé et été soigné, qualifiant ses propos d’« attaque contre la nation » et réclamant dix ans de prison ferme et un million de dinars d’amende.
Une amende d’un million de dinars
Dans son réquisitoire, le procureur a requis une peine de dix ans de prison et une une amende d’un million de dinars. L’affaire est mise en délibéré et le verdict sera prononcé le mardi 1 juillet 2025.
En dernier mot, Sansal a dénoncé un procès visant la littérature, contraire à la Constitution algérienne qui garantit liberté de conscience et d’expression. L’affaire est en délibéré, le verdict est attendu le 1er juillet.
L’écrivain avait, pour rappel, qualifié l’Algérie « d’un truc facile à coloniser » contrairement au Maroc qui était « un Etat » imprenable. Devant la Cour, l’auteur de « L’enfant fou de l’arbre creux » a soutenu qu’un procès était fait « à la littérature » à travers sa personne et qu’en tant que citoyen algérien et français, il avait le droit de se prononcer sur la politique des deux pays. Un droit permis, selon lui, par la Constitution.
Détenu depuis le 16 novembre 2024, Boualem Sansal est poursuivi pour « atteinte à corps constitués, atteinte à l’unité territoriale nationale, atteinte à l’ANP et intelligence avec une partie étrangère ». Le 27 mars 2025, il a été condamné à cinq ans de prison ferme par le tribunal de Dar El Beida, à Alger, une peine assortie d’une amende de 500 000 dinars. Dans le procès en appel, le procureur a doublé, dans son réquisitoire, ces peines.
Le jeudi 20 mars 2025, le parquet de Dar El Beida avait requis une peine de 10 ans de prison ferme à l’encontre de l’écrivain. Après avoir révoqué ses avocats, dont le français François Zimeray, Boualem Sansal a choisi de se défendre seul face au tribunal.
En France où l’écrivain est très défendu par les milieux de droite et d’extrême-droite, des officiels ont demandé la libération de Boualem Sansal au motif qu’il était « âgé et malade ».