La question palestinienne: Sami Kleib estime que “la solution des deux Etats” n’est plus possible

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La question palestinienne: Sami Kleib estime que
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Les journalistes libanais et franco-syrien Sami Kleib et Majed Nehmé étaient, ce lundi 4 décembre, les invités du Forum du journal El Fadjr, à la Maison de la presse Tahar Djaout, à Alger, pour intervenir sur la situation dramatique à Ghaza.
Le débat, marqué par la présence de l’ancienne ministre de l’Environnement Fatma Zohra Zerouati et la direction d’El Fadjr Hadda Hazem, a été précédé par la projection d’un extrait d’un documentaire réalisé Territoires palestiniens par Nassima Abderrhamane en 1995.


Pour Sami Kleib, ex-directeur de l’information de la chaîne libanaise Al Mayadeen, la solution des deux Etats, Palestine-Israël, n’est plus possible, “en raison de considérations liées à la géographie, aux colonies et aux agressions répétées d’Israël contre les Palestiniens”.


” Je pense que ce qui s’est passé le 7 octobre 2023 va se répéter à plusieurs reprises à Ghaza, en Cisjordanie et à El Qods, malgré le blocus et le harcèlement. Aussi, la solution qui peut être posée et qui peut être réalisée, est celle d’un seul État, comme en Afrique du Sud, où tous les citoyens ont les mêmes droits et devoirs. Ceux qui ne veulent pas vivre dans cet État, le quittent”, a-t-il dit.


Et d’ajouter : “Ces dernières années, le projet juif religieux extrémiste est devenu plus visible, a dépassé les projets politiques. Il existe actuellement près de 100 millions néosionistes ou les chrétiens sionistes, présents aux Etats Unis, en Amérique du Sud et en Afrique. Des églises émergent partout, dans le monde arabe notamment,  liées à ce mouvement. Des églises qui n’ont aucun rapport avec la chrétienté. C’est un système militaro-religieux qui veut imposer le fait-accompli”.


“La guerre de 1967 se poursuit à ce jour “

Majed Nehmé, directeur du magazine « Afrique-Asie”, qui est édité à Paris,  a, pour sa part, critiqué la position des Etats-Unis qui soutiennent Israël dans son offensive contre Ghaza et sa population civile. “Biden et ses ministres participent aux réunions de l’état-major israélien. C’est la reconnaissance qu’Israël est une entité coloniale créée par l’Occident. Il fallait, selon un Premier ministre britannique, créer un Etat-barrière entre l’Egypte et la Syrie et entre l’Afrique et l’Asie. Cela a été dit en 1841. A l’époque, la plupart des juifs étaient contre cette proposition. Ceux qui l’avaient soutenu étaient les évangéliques sionistes”, a-t-il dit.


Selon une ancienne croyance, les évangéliques sionistes pensent que la création d’Israël permettra l’arrivée du Messie (Jésus) sur Terre. “Tout projet colonial est voué à l’échec. Après 132 ans d’occupation, la France a été obligée de quitter l’Algérie, défaite par la révolution historique des Algériens (…) A Ghaza, la résistance n’est pas défaite. La guerre de 1967 se poursuit à ce jour et n’est pas celle des Six jours comme propagé par les Occidentaux. En 1973, les arabes avaient gagné la guerre face Israël, n’était-ce la trahison de Anouar Sadat. Après l’effondrement de l’URSS, le Conseil de sécurité était devenu une chambre d’enregistrement des décisions américaines. Ce n’est plus le cas actuellement. Aujourd’hui, la Chine et la Russie recourent de plus en plus au véto au niveau de ce Conseil. A cause de la Syrie, la Chine a utilisé treize fois le véto. Les Occidentaux cherchent à diviser la Russie”, a analysé Majed Nehmé. “Dans l’Histoire moderne, les Etats Unis ont adopté 80 vétos au Conseil de sécurité. 55 des vétos ont été décidés contre la Palestine et favorables à Israël”, a précisé, de son côté, Sami Kleib.

“Nous sommes face à un ennemi injuste qui ne comprend que le langage de la force. Ce que nous constatons aujourd’hui est le résultat de ce que certains ont appelé l’Accord de paix (les Accords d’Oslo de 1993). C’était un accord de soumission. L’Autorité palestinienne avait cédé à l’époque sur deux droits essentiels : le retour des réfugiés et la question d’Al Qods. Yasser Arafat pensait faire des concessions en attendant d’améliorer les conditions de l’Accord après. Israël a engagé plusieurs guerres et commis d’innombrables crimes depuis les Accords d’Oslo. Les colonies israéliennes se sont étendues plus de 600 fois dans les terres palestiniennes depuis 1993. Les détenus palestiniens devaient sortir des prisons après les Accords d’Oslo. Ils sont aujourd’hui près de 8000 à croupir dans les prisons israéliennes”, a constaté Sami Kleib.


“Nous assistons à l’effondrement de la communauté politique internationale”


Selon lui, les Accords d’Oslo ont réduit une partie de l’Autorité palestinienne à protéger “les intérêts sécuritaires” de Tel Aviv. “Nous assistons à l’effondrement de la communauté morale et politique internationale, particulièrement atlantiste, avec ce qui se passe à Ghaza. Nous assistons à un génocide commis contre un peuple. C’est un génocide organisé. Il ne s’agit pas d’une guerre entre deux armées. Certains arabes ont cru naïvement qu’Israël allait accepter le processus de paix alors que tous les indices prouvent que cette entité voulait piller toute la Palestine. Il ne reste de la Palestine historique qu’entre 17 et 20 % du territoire. Les territoires sont séparés. Il n’existe pas un endroit où les institutions d’un Etat peuvent être installées. Aujourd”hui, on veut forcer les Palestiniens à quitter Ghaza et la Cisjordanie”, a-t-il ajouté.

Sami Kleib, qui a animé la célèbre émission “Ziara Khassa” diffusée par la chaîne qatarie Al Jazeera, a appelé à mieux étudier “la pensée sioniste” pour comprendre ce qui se passe aujourd’hui. Il suffit, selon lui, de lire le livre de Benjamin Netanyahu “A Place Among the Nations: Israel and the World” (Une place parmi les nations : Israël et le monde), paru en 1996.
“Il a clairement écrit qu’il n’y aura pas d’Etat palestinien et qu’El Qods ne sera jamais palestinienne. Il a indiqué que les Palestiniens de Cisjordanie doivent aller en Jordanie. Le palestinien doit choisir, selon lui, entre accepter l’existence d’un Etat juif ou partir”, a-t-il noté.


Sami Kleib a évoqué “la destruction planifiée” de sept Etats arabes ces dernières années (depuis le début des années 1990). “Ils ont tenté de diviser le Liban et l’Irak. Près de 500.000 enfants ont été tués en Irak après l’invasion américaine en 2003. Et, 5000 savants irakiens ont été assassinés. Le Musée de Baghdad a été pillé. Le pillage des biens culturels est une opération étudiée par les israéliens. Au Musée de Baghdad, les parchemins sumériens détruisent les thèses israéliennes sur l’existence de l’Etat d’Israël (dans les anciens temps)”, a-t-il précisé.


“L’Algérie est aujourd’hui le cœur battant de la Palestine”

Il a rappelé que l’Algérie avait connu dix ans de guerre interne (dans les années 1990). “Le Soudan a été divisé en deux. Cette division relevait d’un plan sioniste soutenu par les américains. Israël entend pénétrer l’Afrique et établir les relations avec les pays de ce continent dont le Sud-Soudan. Il voulait même faire partie de l’Union africaine. La Libye a été détruite ensuite, suivie du Yémen et de la Syrie. La Syrie connaît une instabilité depuis douze ans. On fait tout pour allonger cette guerre interne en Syrie pour détruire complètement le pays. Ces pays ciblés  soutiennent tous la cause palestinienne. L’Algérie a une position courageuse par rapport à cette cause. L’Algérie est aujourd’hui le cœur battant de la Palestine”, a relevé Sami Kleib, en rappelant le soutien financier apporté par Alger aux Palestiniens.


Selon lui, des pressions occidentales ont été exercées sur certaines capitales arabes, à l’image de Nouakchott, pour établir des relations diplomatiques avec Tel Aviv.  


Il a estimé que la Palestine a gagné la bataille de l’image au niveau mondial. “Un ambassadeur israélien s’est même plaint que les jeunes européens parlent aujourd’hui de Ghaza et ignorent la Shoah”, a relevé, pour sa part, Majed Nehmé.
Pour Sami Kleib, l’armée israélienne ne peut pas gagner les batailles terrestres. “Elle tient sa force de l’aviation qui bombarde et détruit. Cette armée a échoué à Beyrouth et lors de la bataille de Oued Hojear au Sud Liban  (en 2006 face au Hezbollah)”, a-t-il dit. Il a évoqué “les grandes transformations” sur le plan mondial avec la densification des relations économiques entre la Chine et la Russie et le changement de la monnaie pour le paiement des transactions commerciales à la place du dollar.


“Les arabes ont une opportunité en or devant cette division internationale”

“Avant la guerre de Ghaza, le président américain annonçait le projet de construction d’une route commerciale allant de l’Inde jusqu’en Europe, en passant par les Emirats arabes unis, l’Arabie Saoudite, la Jordanie et l’Entite sioniste. Ce projet est censé concurrencer l’initiative de la Chine, “la Ceinture et la Route” (nouvelle Route de la soie). Nous sommes face à un grand conflit. Les arabes ont une opportunité en or devant cette division internationale”, a analysé Sami Kleib.


Et de poursuivre : “Il existe actuellement une résistance nationale à Ghaza et en Cisjordanie, au Sud Liban, en Irak et au Yémen. La Russie va avoir ce qu’elle veut en Ukraine en annexant les territoires qu’elle revendique. Les échanges commerciaux entre la Chine et l’Arabie Saoudite dépassent en valeur 100 milliards de dollars par an. Les Emirats sont l’un des principaux partenaires commerciaux de la Chine. Pékin a parrainé l’accord entre Ryad et Téhéran. L’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis sont membres des BRICS. Les arabes doivent tirer profit de cette situation et proposer des négociations sur de nouvelles bases en respectant les droits des Palestiniens”.


Il a souligné que les arabes, contrairement aux israéliens, ont toujours été favorables à la paix. Il a cité le livre “Paix ou guerre : les secrets des négociations israélo-arabes, 1917-1995”, paru aux éditions Stock à Paris, du journaliste français Charles Enderlin. L’après 7 octobre signifie; selon lui, le retour du dossier palestinien sur la scène international et l’échec du projet de “normalisation” diplomatique avec Israël porté par les Accords d’Abraham de septembre 2020.

” Israël a perdu en 57 jours de guerre  60 milliards de dollars. Ces pertes financières peuvent être compensées par les Occidentaux mais le plus important est de constater qu’aux Etats Unis, les jeunes, au sein du Parti Démocrate, dénoncent “le coût élevé” d’Israël pour les américains et appellent à cesser de financer Tel Aviv et de lui envoyer des armes”, a souligné Sami Kleib.

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